we don't need much

we don't need much

Rentrer à la maison. Enfin plus précisément en ville. Sa maison, Jakob ne l'avait jamais vraiment quitté. Il vivait sur son bateau depuis trois ans maintenant. C'était son havre de paix. Avec la capacité de voyager. Ce qui n'était pas pour lui déplaire à notre marin. Mais après ces longs mois d'absence, la compagnie de ses proches lui avait laissé un vide. Un vide qui semblait jour après jour devenir un gouffre impossible à combler. Alors quand l'équipe d'océanographes lui a proposé de continuer la mission pour six mois, Jakob refusa. Il était temps de rentrer. De retrouver ses proches. De faire face à la réalité.

Il fut accueilli par sa famille avec plus d'enthousiasme qu'il aurait pu imaginer. Ses parents avaient soigneusement évité le sujet des enfants et fait comme ci tout était normal. Ce qui permis à Jakob de souffler. D'accepter. De se rendre à l'évidence. La vie continuait. Il avait rapidement reprit contact avec James. Lui proposant une sortie au Waterfront Park. Un terrain de basket avait été installé et Jakob avait envie d'une sortie sportive. En tout cas une sortie qui ne risquait pas de finir à quatre pattes sous la table ou avec un mal de tête le lendemain. Alors une partie de basket entre amis s'était tout naturellement présentée comme la solution idéale.

En tenue de sport, Jakob était arrivé à pied de la marina. Son ballon à la main, il profitait de la vue imprenable sur la baie. Vraiment ce lieu lui avait manqué. Il croisa un nombre incalculable de famille, de couple, de coureur ou de simples promeneurs. Il se demanda un instant ce qui se serait passé si il était encore avec Isolin. Puis effaça cette question du revers de la main. Il serait malheureux. Tout simplement. Il aurait ses enfants avec lui. Mais seraient-ils heureux de cette situation ? Avoir des parents dans un conflit perpétuel quel était l'intérêt ? Et même si lui avait eu envie de se battre pour son couple, il aurait fallu que ce combat se fasse à deux. Il était donc perdu d'avance. Aucun bonheur possible pour cette famille aujourd'hui disloquée. Il fallait se rendre à l'évidence. Jakob avait compris une chose durant son voyage, il ne pouvait pas tout contrôler. Même si c'était extrêmement difficile pour lui de l'avouer. Lâcher prise. Accepter les imprévus.

Arrivé sur le terrain, le marin fit claquer le ballon sur le sol. Il raisonna plusieurs fois et Jakob visa le panier en marquant son premier panier. Une sorte de victoire prémonitoire sur sa capacité à reprendre une vie normale.

@James Harrington

ft. Jakob Eddusen
We don't need much

« Mais c’est gentil ça ! » Ce geste de tendresse volé à la réalité de la part de Mila. Ca me faisait encore un peu bizarre. J’avais toujours du mal à accueillir, accepter, que c’était bien vrai. Elle avait nettement fait des efforts depuis la naissance des filles. Elle ne voulait pas vivre la même chose qu’avec les garçons et se réveiller 4 ans après à avoir à peu près tout manquer dans les premières années de ses enfants. On réapprenait encore à être ensemble, aussi souvent. Faut dire que c’était dur de faire moins que ce que nous vivions niveau fréquence… J’y répondais à son geste, sans hâte, et pourtant, j’étais attendu ! « Si jamais… » Mais pas le temps de finir ma phrase… « Oui, je t’appelle promis, allez, file ! Et passe lui bonjour pour moi. » Demi révérence à la reine de mon royaume avant de mettre les voiles pour de bon, dans des vêtements de sport dont j’avais oublié l’existence dans mon placard d’affaires.

Mais quelle idée à la con. Et pourquoi j’étais parti de chez moi en courant en me disant « super ça m’échauffera ! » Hein ? Mais James ! Mais… J’avais l’impression d’être un fumeur depuis mes 13 ans, à avoir arrêté le sport et jamais fait d’études. Et non. Non. J’avais juste 8 ans de mariage et 4 enfants. Est-ce que c’était une raison valable pour en perdre toute ma respiration au bout du premier effort ? J’arrivais sur ce fichu terrain en trottinant à peine. J’avais même oublié que je courrais ! C’est que finalement c’était juste le lancement qui avait été particulièrement difficile ? Et puis rappelons-nous, Brevik ce n’est pas bien grand, donc ça n’avait de toute façon pas duré très longtemps…

« Allez, on fait les équipes ? » Lançais-je en marchant, le souffle court, content de ma vanne nulle… Ce serait du un contre un du début à la fin ! Et il fallait quand même que je dise ce style d’ânerie. Rire, et soleil dans les yeux en approchant du grand marin. « Allez partage donc un peu cette odeur de la victoire avant qu’elle s’éloigne de toi ! » Ma manière de l’inviter à une étreinte familiale avant de me transformer en adversaire pour le reste de l’après-midi, enfin une partie disons, et en plus avec un bon mauvais jeux de mots, je parlais bien de l’odeur de la sueur qui marquait déjà mon t-shirt. Ah mais quelle idée à la noix ce footing improvisé… Mais qu’est-ce qu’il m’avait manqué ce Jak ! Mon regard se posait sur lui, plein de fierté, de joie, d’amitié, avec un sourire sincère et hyper étiré, et un ptit clin d’oeil. Et bien oui, je n’avais pas perdu le look et la dégaine italienne en quelques mois ! Puis je lui pinçais la joue comme celle d’un enfant : « Ah non,  commences pas à me dire que t’as perdu autant de poids en si peu de temps ? Non mais il a presque la peau sur les os ! » Ce qui était plutôt carrément faux, il était musclé comme je sais pas quoi, et il semblait avoir réussi à prendre du temps pour lui en plus de son travail. J’espérais bien que mes remarques nulles finissent par lui arracher un rire, mais c’était pas encore tout à fait sûr ! Je lui ferai rattraper son poids d’avant le départ un autre soir, ou bien juste après le basket peut-être ? « Ah ben je suis tellement content de te voir que je crois que j’ai pas fait autant de blagues nulles en si peu de temps à qui que ce soit depuis bien… pfiou ! Ben ton départ à la mer matelot ! Et tout à coup tu veux courir sur la terre et me montrer tes talents de basketteur ? C’est quoi l’idée hein ? Tu trouvais que James était suffisamment petit pour être battu sans avoir de niveau hein ?! » Je continuais les bêtises, et j’en loupais pas une pétard !

De toute façon mon cerveau était sur off. Il voulait simplement passer un bon moment avec Jakob avant de peut-être continuer à se raconter toutes nos histoires émotionnelles et personnelles et familiales comme on avait tant l’habitude de le faire. Mais pour le moment, juste un ramassis de connerie et du sport. C’était bon ça !


@Jakob Eddusen

we don't need much

La vanne qui annonça l’arrivée de James fit rire le marin qui accueillit son ami d’une étreinte. Il fronça les sourcils et lui balança du tac au tac : « Ben dis, t’as couru le marathon pour venir jusqu’ici ou bien ? » Un sourire s’afficha sur le visage de Jakob. Beaucoup trop heureux de retrouver l’italien en face de lui. Quand on parle d’amitié, il est parfois difficile d’expliquer ce qui fait que deux personnes match ensemble. Et quand ces deux là se sont croisés, on peut dire que ça avait matché direct. Heureux que sa cousine reine des glaces ait trouvé le soleil qui pourrait la faire fondre, Jakob avait accueilli son cousin par alliance avec enthousiasme. Et très rapidement, un lien profond s’était tissé entre eux.

Jakob fit claquer le ballon sur le sol pendant que James lui balança un pseudo compliment sur le corps du marin. Il faut dire qu’il avait passé ces derniers mois à crapahuter sur son voilier. A vrai dire, Jakob n’y avait même pas fait attention. Il faut dire qu’il n’y avait pas beaucoup de miroir sur le Bifröst et celui qui lui servait à maintenir une barbe un minimum taillée ne pouvait guère l’aider. Le capitaine écoutait son ami parler tout en effectuant des dribbles. Et quand ce dernier expliqua sa venue ici comme étant le reflet de l’orgueil de Jakob ce dernier lui balança le ballon sur le torse. « Allez Harrington ! Tu vas pas me dire que tu as peur d’un marin qui sait pas marcher sur la terre ? En plus, tu vas t’entraîner pour rester en forme pour ta marmaille ! Faut dire qu’ils grandissent vite et Alex et Cass’ vont bientôt te dépasser si tu fais pas d’exercice d’élongation. » Petit clin d’œil amusé et main sur les hanches, Jakob taquina son ami. Il était temps que James réponde et surtout joue. Jakob, posté devant le panier, était prêt à intercepter l’italien.

@James Harrington

ft. Jakob Eddusen
We don't need much

Le capt'ain ne croyait pas si bien dire... j'avais couru le marathon avant de venir et c'était rien de le dire ! Ca me faisait un bien fou de le revoir, et je crois que j'avais envie de déballer un million de choses qui m'était arrivées, ou bien aux enfants, ou bien à Mila, puis dans la ville, puis... Mais il fallait que je me freine dans cet élan, car la compétition sur le terrain commençait. Je riais à sa suggestion d'élongation avant d'accuser réception du coup de ballon lancé en ma direction sans prévenir. Petite reprise des esprits avant d'enchaîner : « J'espère qu'ils hériteront d'un gêne ou deux de la famille de Mila, vous êtes bien plus grand que du côté Harrington... Ce leur ferait pas de mal ! » Raclement de gorge, petit soupire sportif de motivation avant de m'armer du ballon, tout en essayant de lire dans le regard du capitaine. Quel move allait-il faire pour m'empêcher d'aller jusqu'au panier ?

« Avant qu'on s'entre-tue, Mila te passe le bonjour ! » Minuscule stratège pour enchaîner mon premier départ vers la victoire en espérant prendre le marin de cours. Et... Panier ! « Pfiou ! Ca va pas être simple cette partie je pense ! » Malgré ma tentative de diversion, Jakob avait eu le temps de réagir. « Tant qu'on marque on garde la main ? C'est comme ça que ça marche je crois ? » Disais-je pour garder la main mise sur le ballon. « Bon et comment va Pilote ? Il survit ? » Nouvelle tentative de prise de vitesse, mais interceptée par Jakob cette fois-ci. Le subterfuge de la conversation, ça avait marché une fois, mais une fois seulement... Balle au marin, et suite du match au prochain épisode...


@Jakob Eddusen

we don't need much

Petit mais malin, l'italien. Après avoir réceptionné le ballon, il répliqua qu'il aurait aimé que ses enfants prennent quelques gènes du coté de la maman. Haussement d'épaules. La hauteur de taille ne fait pas la grandeur d'âme, et James pouvait se vanter d'avoir un grand coeur. Si déjà ses enfants héritaient de ce trait de caractère, il avait gagné. Mais Jakob n'eut pas le temps d'exprimer ses pensées et James le prit en traitre. Il lui annonça la salutation de Mila avant de le prendre de vitesse pour aller marquer un panier. «  Hey !  » Râla le marin en essayant de récupérer le ballon. Mais l'excuse de James fit battre en retraite Jakob qui ne put retenir un sourire avant de claquer la langue et de lâcher un soupir. Il se positionna devant James, appuyé sur ses jambes, prêt à défendre le panier.

James reprit par une question. L'italien était bavard mais Jakob pouvait l'être aussi. Il afficha un sourire amusé en secouant la tête, concentré sur le ballon. Cette fois il ne l'aurait pas. «  Bien. Je crois qu'il est content de retrouver des potes. Oogi, entre autre.  » Le corgi d'Enid était devenu un compagnon de jeu plutôt régulier du border collie. «  Et comment elle va, Mila ?  » Demanda Jakob alors que James amorçait une monté vers le panier. Le capitaine le prit de vitesse et claqua le ballon au sol pour le récupérer avant de le lancer dans un saut vers le cerceau. Il entra dans ce dernier et Jakob afficha un sourire satisfait avant de récupérer le projectile que venait de lui lancer son cousin. «  J'ai cru comprendre que ça se passe plutôt bien ces derniers temps ?  » Reprit Jakob en se mettant à la place de James l'instant d'avant. Face à l'italien qui bloquait l'accès au panier.

Jakob avait eut quelques nouvelles de la famille durant son voyage. Il n'était pas complètement coupé du monde. En plus du visio avec ses enfants plusieurs fois par semaine, il avait eu l'occasion d'avoir James, Drew et même Izak en communication. Il avait pu voir la petite tête d'Enid régulièrement et il avait été heureux d'apprendre que la famille allait bien. Plutôt très bien même. Tout semblait s'arranger. Peut-être devait-il partir plus souvent finalement. Quelque chose l'avait chiffonné cependant, des nouvelles de son grand-père. Enfin plutôt les non nouvelles puisqu'Enid semblait éviter le sujet à chaque fois qu'elle l'avait au téléphone. Enfin, il aurait bien l'occasion de lui en parler. Ils avaient prévu de se voir dans quelques jours.


@James Harrington

ft. Jakob Eddusen
We don't need much

Héhéhé… ouais… ça allait se compliqué. Le marin ne se ferait plus avoir par mes belles petites phrases et mon air de touriste. Les nouvelles de Pilote m’intéressaient vraiment, et j’étais content de savoir que de retrouver la terre ferme ça lui faisait du bien à lui aussi. Non parce que manquerait plus que le matelot et son chien ne soit plus sur la même longueur d’onde ! Le temps d’exprimer par un espèce de « Aaarg ! » L’échec de ma nouvelle tentative, ballon rendu à l’adversaire, que Jakob se livrait aussi au jeu des questions pendant la partie de basketball. Mila… mini seconde perdue à penser à elle, juste à elle, avant le retour à la réalité. Mais une belle réalité ! Parce que Mila, elle allait bien. Vraiment. C’était pas des blagues ce qu’on lui avait fait comprendre au capitaine. « C’est vrai que… t’es parti un moment quand même ? » Maintenant que j’y pensais, le temps était passé, de fait, et certaines choses évoluaient, changeaient, progressaient… Et avec Mila, ça allait sacrément bien en ce moment. Est-ce que vous pensez qu’avec ma lenteur pour lui répondre il comprenait ça ou l’inverse ? Soupire (ou plutôt, tentative de récupération de respiration). « Avec les filles aussi c’est tellement différent ! » Est-ce que je venais de dire complètement autre chose pour faire comme si ça répondait à la question de Jakob ? « Oui, ça se passe vraiment bien. » Regard sincère, sourire sincère. Tout à coup, je n’étais plus dans le basket. Je passe beaucoup trop facilement du coq à l’âne et ce n’était pas qu’une bonne chose…

Ca aurait été le moment idéal pour une revanche dans les quasi même conditions. Mais Jakob ne semblait pas profiter de l’opportunité, quel homme… fort ! J’aurais été faible. Faible et tenté, après avoir mis mon collègue dans un autre univers, d’attaquer à nouveau à l’improviste. Ce que Jakob ne faisait pas, en respectant mes réponses et la question qu’il avait posé. Mais, trêve de plaisanterie. Réponse donnée, nouveau regard défiant en direction de mon cousin par alliance. J’attendais. Un mouvement ! Une attaque, une tentative, quelque chose quoi… Et il était bien là, au rendez-vous. Un partout, balle au centre. Ou plutôt balle au marin qui avait marqué et conservait la balle pour la prochaine attaque. Je reculais franchement de deux pas, pour lui laisser la place, surtout pour lui donner envie de shooter. Je voulais voir ce qu’il avait dans le ventre à ce niveau-là ! « Oh oh oh oh…! » Je prenais de l’avance pour être sûr de récupérer le ballon à la place de Jakob. « Eh beh, on va terminer avec une séance de tires hein ! » Ce tir, n’avait clairement pas été convaincant. « Les enfants ? Depuis ton retour ? Ça va comment ? »

Je ne sais pas combien de temps on allait tenir à se faire la conversation tout en essayant de faire du sport. Peut-être qu’il fallait qu’on fasse du sport, puis qu’on fasse la conversation ? Je crois que ce serait plus malin, mais on avait bien trop envie de faire les deux en même temps… « T’aurais le temps pour un verre après ? » Autant prendre la température. Pas sûr que j’ai le temps moi de mon côté non plus alors bon, je le comprendrai bien.


@Jakob Eddusen

we don't need much

Avec ces deux bavards, il semblait évident que le basket n'était peut-être pas la meilleure idée pour des retrouvailles. Mais à vrai dire, Jakob avait aussi besoin de se défouler. De parler oui, mais il avait besoin de s'ouvrir. Et pour prendre le temps de s'ouvrir, le prétexte du sport était tout trouver. Partir sur des questions plutôt vagues. Pour rentrer dans le vif du sujet. Parler d'amour, de sentiments. Parler de colère et de peine. C'était un besoin viscéral. Mais avec un besoin de contrôle que pouvait lui apporter sans problème le basket. Se concentrer sur le ballon. Sur le panier. Tirer. Marquer. Se concentrer sur la cible. Ne pas se concentrer sur ses sentiments pour n'exprimer que des mots. Relâcher la pression dans une passe et tirer encore.

Pour James tout allait bien. Avec Mila, avec la paire de jumeaux. La différence avec les filles. Mais c'était bien. Vraiment. Et Jakob fut soulager d'entendre ça. Vraiment. La sincérité des mots de son ami le fit sourire. Ainsi, il pouvait aussi se passer des trucs cool en amour. Tout n'était pas toujours chaotique. Ca s'arrangeait aussi. Quelques passes et dribbles plus tard la question fatidique. Les enfants. Jakob fit claquer le ballon au sol plusieurs fois avant un nouveau tir vers le panier, qu'il rata. Il fit une grimace. Son coeur lui faisait mal. Pouvait-il encore penser à ses enfants sans avoir la gorge serrée ? Il finit par pousser un soupir et fixer James. « Ils vont bien. » Pouvait-il éviter d'avoir les larmes aux yeux en disant cette phrase ? Ils allaient bien. Sans lui. Sans leur père. Ils allaient bien dans une ville qui n'était pas la leur, loin d'une partie de leur famille. Ils allaient bien.  Et ça lui faisait mal. Nouvelle grimace avant de passer ses doigts sur ses yeux histoire d'assécher tout ça. La proposition de James fit sourire le marin. « Je crois qu'une balade au bord de la mer serait plus judicieux... » Souffla Jakob en faisant claquer le ballon une nouvelle fois sur le sol. « J'ai pas vraiment envie de prendre de mauvaises habitudes...Et boire dans cet état c'est pas forcément la meilleure idée...si tu vois ce que je veux dire... » Reprit-il en posant une main sur l'épaule de son cousin par alliance.


@James Harrington

ft. Jakob Eddusen
We don't need much

Je rattrapais le ballon à nouveau, sauf qu’en me retournant vers le marin, je ne voyais plus le même homme. Mince. Je crois que j’avais compris. Mauvais sujet James, mauvais sujet… Et tu le savais pourtant que c’était sensible ! Soupire inaudible. Je me maudissais intérieurement d’avoir mis Jakob si vite au milieu d’un tourbillon d’émotions agréables et désagréables et géniales et terribles en même temps. Je regardais mon matelot avec la plus grande compassion, mais surtout pas ces regards de pitié qui sont insupportables et dont on a en fait, que très rarement besoin (jamais ?). La mâchoire serrée, les yeux fixes et pas en train de papillonner. Le ballon retournait dans les mains de Jakob qui en avait bien plus besoin que moi. Je souriais à sa correction de proposition. De fait, si on voulait éviter de finir à moitié à poil sur la scène du Black Karv, et profiter un peu de ces échanges de vraies nouvelles, autant qu’on fasse quelques pas. Hochements de tête positifs, et nombreux. J’étais plus que d’accord, et je voulais absolument faire ça, avec lui. Cependant, son trait d’humour me permettait d’ajouter quelque chose de plus relax à mon tour : « Hein ? Une mauvaise habitude ? Moi ? Toi et moi ? Des mauvaises habitudes ? » Air d’italien choqué, surprise, étonné par de tels soupçons !

Je tapais dans le dos du capitaine avec à peu près zéro délicatesse, et commençais à marcher en direction du sable. C’est qu’on avait déjà assez bien transpiré pour aujourd’hui, et au pire, on repasserait pour se faire quelques tires. Une partie de moi était persuadée que ce serait plus simple de faire du sport une fois qu’on aurait eu le temps de parler un peu plus. Et comme bien souvent, c’est moi qui commençait. Comme si ça mettait les autres à l’aise. Alors que peut-être ça les fatiguait ? Tant pis pour cette fois à nouveau. « Tu sais que notre petite Hanna a ses problèmes cardiaques, » c’était une affirmation, il le savait. « Ben qu’est-ce que ça nous oblige à être présent, attentif, envers elle, mais aussi à redoubler d’attention avec les autres du coup ! » Je disais pas ça pour dire ce qui allait pas dans ma famille, et faire comme si, ses problèmes, c’était des problèmes comme les autres, pas du tout. Je voulais en arriver à un point très précis. « Et tu vois ça, je crois que ça a été l’électrochoc pour Mila, le déclencheur, la vraie prise de conscience ? Que sa famille a tout autant besoin d’elle que son boulot. » C’était ça l’idée, c’était de quand même pouvoir partager ce qui va bien avec un cousin, avec la famille, même quand lui il est pas au top. C’est une règle informelle que j’aimerais formaliser avec lui. Ne jamais se retenir de dire ce qui va bien dans sa vie, si la mienne est pas au top. « Tu devrais venir manger à la maison, déjà les enfants seraient bien trop heureux de te voir ! Et puis… » J’avais trop envie qu’il voit ça de ses propres yeux. Sa cousine, le changement dans son regard, dans son attitude, tout en restant elle-même, et très fidèle à elle-même et accro à son travail…! Mais, quand même, cette petite lumière en plus ? Ce petit changement ? « On espère quand même, grâce à ce que nous disent les médecins, que ça va s’arranger d’une année sur l’autre avec Hanna. Mais quand on parle du coeur, on sait jamais trop ce qui peut se passer… » Je les croyais pour me rassurer. Mais j’imaginais toujours le pire, surtout quand il s’agissait de mes enfants.

Et je pouvais parler comme ça pendant des heures si ça permettait à mon cousin par alliance de ne pas avoir à se forcer à mettre des mots sur des choses trop difficiles pour le moment. Ou bien si ça lui permettait de voir qu’il avait plus que sa place parmi nous, qu’il soit en mer ou à Brevik. C’était normal pour moi de lui partager tout cela, c’était normal qu’il sache tout ça dans les détails. Je crois que ça me faisait du bien à moi aussi, enfin c’était sûr ça… « Cassandre a toujours les cheveux super longs, je te jure…! Je te jure c’est agaçant ! » Le petit grandissait, mais refusait toujours formellement qu’on lui coupe le moindre poil sur son crâne d’enfant. Mais pourquoi à la fin ?! C’était un mystère pour ses parents.

@Jakob Eddusen

we don't need much

James avait compris le message. Parler d’autre chose pour le moment. Le laisser digérer l’information. Accepter de ne pas insister. Il fit une allusion à leur sortie karaoké peu avant son départ et Jakob secoua les mains en signe de défense. « Ouai. Évitons ce genre de…situation…s’tu veux… » Répondit-il dans un rire. Il avait un vague souvenir de cette soirée, mais les lumières, la chaleur, et le fait de se retrouver torse-nu, ça il l’avait bien gravé. Et il n'était pas disposé à retenter l'expérience de sitôt.

Jakob encaissa la tape de son ami en se frottant l'épaule avant de le suivre direction la mer. Elle n'était pas très loin et les deux amis eurent tôt fait de la voir apparaitre avec le soleil couchant. James reprit la discussion. Il parla d'Hanna. Jakob acquiesça pour ses problèmes de santé. Pauvre enfant. Si jeune et déjà à devoir se battre. La vie semblait plus facile pour certains. Mais ça avait ses avantages selon l'italien. Le changement d'attitude de Mila. Le fait qu'elle s'investisse plus dans la famille, dans leur couple. L'électrochoc. C'était le terme. James monopolisait la conversation. Probablement pour éviter de laisser à Jakob le temps de gamberger. Ce dernier écouta, réagissant par des sourires et des hochements de tête. L'invitation fut finalement lancé. « Bien sûr qu'il faut que je débarque chez vous ! Les jumeaux me manquent...Et il faut que je fasse mieux connaissance avec les filles. » Reprit le capitaine en fixant l'horizon. James continua. Les médecins étaient optimistes. « C'est une battante. Comme tous les membres de sa famille. Et avec autant d'amour autour d'elle, elle ne peut que se rétablir ! » Petit clin d'oeil. Jakob voyait mal comment ça pouvait en être autrement. Il fallait qu'elle vive.

Allez, passons à un sujet moins dramatique. Cassandre et ses cheveux longs. Jakob sourit et secoua la tête. « Mais laisse le ton fils. Les cheveux long c'est la classe ! » Répliqua le marin en haussant les épaules. L'envie de parler de chose moins triste ? « J'avoue c'est pas le délire d'Anton...En ce moment c'est les dinosaures à fond ! Cet été y'a Jurassic World qui sort au cinéma...Il veut aller le voir...Mais c'est un peu violent pour son âge encore...J'espère qu'ils vont pas le laisser aller le voir... » La dernière phrase fut à peine soufflée. « Ils viennent tout le mois d'aout à la maison ! » Reprit Jakob en affichant un sourire. « Je crois que j'irais faire un tour en mer avec eux pendant quelques jours... » Bon. Il était aussi capable d'en parler sans pleurer. C'est plutôt pas mal ! Faire des projets. Avancer. « Je vais y arriver James. A parler d'eux sans avoir envie de taper dans un mur. C'est aussi pour ça qu'il était temps que je revienne. Réussir à accepter leur départ. Je vais y arriver. » Un soupir et le regard fixé sur l'horizon, Jakob s'apaisa. La mer. Son havre de paix. Il semblait tout de suite plus paisible. Capable d'affronter l'avenir.

@James Harrington

ft. Jakob Eddusen
We don't need much

Jakob, il savait écouter. Il savait nous faire comprendre juste par sa présence, que les informations en plus d’être entendues, étaient digérées, traitées. Tout ça sans un bruit particulier ! Enfin si, parfois, ça lui arrive de parler. Ok je blague, il parle pas si rarement que ça, ça va hein ! Mais quand même, ça me semble important de noter la qualité de présence et d’écoute dont il faisait part, surtout quand je commence à parler de tout, y compris des sujets sérieux qui concernent ma vie de famille, la santé de mes enfants, ma femme.

Je hochais la tête à son commentaire sur Hanna. Ouaip, elle vivrait. Pas le choix. Je ferai tout ce qu’il fallait pour. Le temps d’un instant je me perdais en pensant aux filles. C’était un truc bizarre la vie… On a l’impression de jamais grandir, et pourtant, a un moment donné, on se retrouve avec des enfants dans les bras. C’est pas bizarre ça un peu ? Retour à la réalité lorsqu’on réprimande de ne pas laisser les cheveux de mon fils tranquille. Je m’apprêtais à répondre : « Ah non mais ça devient vraiment compliqué ! Tu verras hein ! Ouais c’était la classe en 2002 peut-être, mais là… » Mais, pas le temps, j’étais content de voir que Jakob prenait la suite pour commencer à parler de sa marmaille à lui. Ah ! Les dinosaures, oh je connais bien cette passion aussi… Tout à coup je ne savais plus si c’était Jurassic World ou Jurassic Park que j’avais trouvé vraiment violent. Peut-être les deux ? Dans l’idée c’est les dinosaures contre le reste de la planète habitée par des êtres humains dans un futur plus ou moins proche de notre présent ? C’était pas le sujet, James… « Super idée ça ! Ça doit leur manquer… » ... De ne pas partir à l'aventure avec le bifröst. C’est que les petits loups de Jakob ont été élevés pour la moitié de leur vie sur un bateau ! Ou en tous cas, avec un papa qui y passe du temps, alors j’imagine que ça crée un lien, avec l’eau ? Je prenais une longue respiration, et j’expirais longuement. Jakob pouvait entendre ça. C’était ma manière d’acquiescer en fixant l’horizon comme lui, concernant sa capacité à accepter le départ de ses enfants auprès de son ex-femme. Je croyais beaucoup à « l’effet miroir ». Si je suis détendu, calme, lorsque Jakob parle de ce sujet, c’est un encouragement, une manière pour lui d’être le plus détendu et calme possible. Ou bien alors, l’effet miroir de la mer sur Jakob ça marchait bien aussi…! « Bien sûr que tu vas y arriver capitaine. » Et je n’avais absolument aucun doute là-dessus. « Et ce que tu fais, tu le fais déjà vraiment très bien. » Je faisais référence aux lettres qu’ils envoyaient à ses enfants lorsqu’il était en mer, aux différents appels qu’il avait avec eux. Jakob est bien présent dans la vie de ses enfants malgré la distance, comme il l’est dans nos vies à nous ici aussi. « Ça donne quoi tes missions dans un futur proche ? » Je voulais savoir si il était déjà sur le qui vive pour un départ fin de l’été, rentrée scolaire, ou si de fait, il pouvait se projeter un peu plus en restant sur la terre ferme quelques mois ?

« Alors ? On dit quel soir pour la soirée pizza ? » Le jardin était prêt, la piscine aussi. Il y aurait tous les ingrédients dont le capitaine aurait besoin pour nous régaler ! C’est qu’il était pas italien, mais ça, je pouvais imaginer le lui laisser… Et admettre que… C’est vrai que… Disons… Enfin, voyons. Ses pizzas sont acceptables. Bon ok ! Ses pizzas sont merveilleuses ! Même si ! Et je maintiens ! Elles ne sont pas tout à fait comme on ferait en Italie, mais il s’en sort bien pour un marin… « Ou non attend je recommence : on attend Août pour faire soirée pizza avec l’ensemble des petits loups. » Comme ça Anton et Alma pourraient aussi en profiter ! « Mais tu viens avant, et cette fois-ci c’est moi qui cuisine ! »  

@Jakob Eddusen